Vidéo – Faut-il aller si loin dans la souffrance ?
La Kényane Hyvon Ngetich a repoussé (très) loin ses limites lors du marathon d’Austin, terminant…à quatre pattes.
Approcher ses limites. Les atteindre. Les repousser, sans cesse. Aller au-delà de la souffrance, de ce souffle coupé, de ces muscles endoloris, de ces jambes tétanisées après un long effort de plus de 40 bornes à scander inlassablement le macadam.
Puis la libération, cette ligne d’arrivée en bout de ligne droite. Encore quelques mètres. Que représentent-ils sur l’échelle d’un 42,195 km ? Une infime partie. Mais les plus rudes, assurément.
Le marathon, la course à pied, et le sport en général en compétition constituent le moyen de la confrontation, aux autres concurrents mais aussi au chronomètre.
La compétition, pour aller au bout de soi-même, pour découvrir une autre facette de sa personnalité dans les interstices d’une joie profonde et d’une douleur ardente. Mais jusqu’à quel point « faut-il » pousser son corps ?
Le marathon d’Austin (Texas), disputé dimanche 15 février, a fourni un exemple saisissant, avec le calvaire de la Kényane Hyvon Ngetich, qui a terminé troisième de l’épreuve en parcourant les ultimes mètres…en rampant, donnant lieu à un spectacle pathétique, ceint d’empathie et d’affliction à la lumière des images :
Hyvon Ngetich, qui possède un record de 2h34’42’’ sur la distance (2011) figurait en deuxième position de ce marathon. « Je ne me souviens pas de deux derniers kilomètres. La ligne d’arrivée, je n’en ai aucune idée ».
« Cela fait 43 ans que je suis impliqué dans le sport, et quand elle est arrivée à la sortie du virage les mains et les genoux, je n’avais jamais vu une telle arrivée » a de son côté déclaré le directeur de l’épreuve, John Conley.
« J’ai continué car j’y étais presque »
Des volontaires ont proposé à Hyvon Ngetich de terminer en fauteuil roulant, ce qu’elle a refusé (elle aurait pu être disqualifiée, même si à ce moment précis, elle ne devait pas y penser…).
Comme aimantée par la ligne d’arrivée, uniquement focalisée sur cet objectif et encouragée par la foule, la Kényane a puisé dans des ressources insoupçonnées, progressant centimètre par centimètre pour franchir la ligne en troisième position, en 3h04’02’’, après s’être fait doubler par Steffan Hannah (3h03’59’’) alors que la victoire est revenue à Cynthia Jerop (2h54’21’’).
« Vous avez réalisé la course la plus courageuse que j’ai jamais vue de ma vie. Vous avez mérité les honneurs, et vous aurez la même prime que si vous aviez terminé deuxième » a souligné John Conley.
« Je me souviens d’une femme en vélo. Elle m’a dit : “vous y êtes presque“. Donc j’ai continué car j’y étais presque. Courir, vous devez toujours continuer, continuer » a glissé Hyvon Ngetich.
Courir, ramper plutôt, jusqu’à l’extrême épuisement, parfois.