Kenya : du mouvement sur le front du dopage
Les dernières semaines ont été riches en rebondissements sur le sujet du dopage au Kenya. Tour d’horizon.
Le cas Rita Jeptoo
L’audition du 15 janvier n’a rien donné. La marathonienne kenyane Rita Jeptoo, considérée comme la meilleure au monde avec trois succès à Boston et deux à Chicago, ne connaît toujours pas le sort que va lui réserver sa fédération (Athletics Kenya, AK) depuis les révélations, en septembre, de son contrôle positif à l’EPO.
A 33 ans, Jeptoo risque tout simplement la fin de sa carrière selon la durée de sa suspension qui sera de deux ou quatre ans. Une nouvelle règle de l’Agence mondiale anti-dopage (AMA) s’applique en effet depuis le 1er janvier : la précédente mesure disciplinaire de deux ans de suspension (dans un cas comme celui de Jeptoo) est désormais de quatre années. L’AK, pour statuer, sollicite donc les instances internationales et donnera son avis d’ici à trois mois.
En attendant, Jeptoo est toujours sous le coup d’une interdiction de courir. Son manager, l’Italien Federico Rosa, dans une interview parue la veille de l’audition, nie toute responsabilité dans le cas positif de Jeptoo. Il lui demande de dire toute la vérité, et ne veut plus de relations professionnelles avec elle. Rosa révèle d’ailleurs que Jeptoo lui a dit avoir été chez un médecin kenyan pour soigner sa malaria.
Pour l’Italien, cette démarche va à l’encontre des règles stipulées dans les contrats des athlètes : à chaque alerte sanitaire, il rappelle qu’il envoie ses athlètes systématiquement chez un médecin italien installé dans la capitale Nairobi. L’entraîneur italien de Jeptoo, Claudio Berardelli, employé par la société de Rosa, a lui aussi pris ses distances avec Jeptoo.
Une prise de conscience
Rita Jeptoo est sans doute la goute d’eau qui a fait déborder le vase au Kenya. En tout cas, face à l’augmentation des cas positifs et des tests manqués, des voix se sont élevées ces dernières semaines dont celle de la légende et président du Comité olympique kenyan Kipchoge Keino. Le double champion olympique 1968 et 1972 en appelle à des peines de prison pour les managers et entraîneurs (étrangers notamment) dont il est avéré qu’ils auraient poussé des athlètes à se doper. Keino a reçu des soutiens des plus hauts sommets de l’Etat kenyan, dont William Ruto, le vice-président et bras droit d’Uhuru Kenyatta. Keino demande aussi la mise en place de passeports biologiques afin de localiser et suivre sur le long terme les athlètes de son pays.
Le Kenya crée son agence anti-dopage avec l’aide de l’étranger
Le Kenya lance officiellement ce dimanche 1er février son agence anti-dopage, avec l’aide de la Chine et de la Norvège. Le Kenya attend beaucoup de la collaboration de ces deux pays dans l’élaboration de campagnes de sensibilisation. Le ministère des sports a aussi précisé que le projet de l’IAAF, d’établir à Nairobi un laboratoire d’analyses d’échantillons, suivait son cours. Dans le cas contraire, le Kenya a indiqué vouloir se rapprocher de l’Afrique du Sud ou du Qatar pour l’analyse des échantillons.
Des suspensions non appliquées !
Au sein de la AK, on s’est enfin étonné cette semaine de plusieurs cas d’athlètes suspendus par l’IAAF mais qui courent toujours en compétition ! L’un des représentants de la AK à Nairobi Barnaba Korir s’est en effet interrogé à ce sujet : « Certains athlètes ont été suspendus voici deux ans par l’IAAF pour ne pas avoir satisfait à des tests anti-dopage et la fédération kenyane n’a pris aucune décision ».
La fédération kenyane s’est semble-t-il réveillée cette semaine puisqu’elle a infligé entre six mois et quatre ans de suspension à huit athlètes.
Texte : Arnaud Bébien.
Photo : Gilles Bertrand.