Dave Mackey – Monstre Comeback
Ceux qui ne connaissent pas encore Dave Mackey vont découvrir une « machine », d’une résilience exceptionnelle. Dave est un ex-coureur élite qui n’a rien perdu de sa superbe, malgré sa jambe en moins….
Avant son accident, Mackey a été champion des USA sur 50 km, 50 miles et 100 km mais il a aussi longtemps été le recordman du rim-to-rim-to-rim (R2R2R) dans le Grand Canyon en 6h59’57 » avant d’être détrôné par la star actuelle de l’ultra-running américain, Jim Walmsley, celui qui vient de re-battre le record de la fameuse Western States® 100-Mile Endurance Run le 29 juin dernier (en 14h09’28 »). Ancien athlète sponsorisé par Hoka One One (il court désormais pour Altra), c’est le 23 mai 2015 au matin, près de chez lui, à Boulder, que sa vie bascule. Lors d’une banale sortie de trail running, Dave Mackey fait une chute très grave. Sa jambe se brise en plusieurs morceaux. Après des heures de secours, 13 opérations et plus de trois mois d’hôpital en continu, sa jambe gauche est amputée. Commence alors un long parcours du combattant : comment continuer à vivre le trail running malgré ce handicap ? Comment conserver la belle motivation et cette générosité qui le caractérise ? Nous nous sommes entretenus avec Dave Mackey. Nous avons découvert un homme simple, doux mais dur au mal aussi. Un bel exemple à suivre pour ceux qui doutent ou sont à un moment donné touchés par la maladie, un accident qui change le cours de la vie. À l’heure où vous lirez ces lignes, Dave Mackey aura participé une fois de plus à sa course préférée, la Race Across The Sky 100-mile run comme disent les habitués, autrement dit la Leadville 100 miles, une course de montagne du Colorado, tout près de chez lui, qu’il a déjà fini l’année dernière, en 24h55’15 », sur une jambe donc, mais aussi en 2014, sur deux jambes, avec un temps de 19h10’45 » et en arrivant 5ème. Respect. Gros,gros respect.
VO2run : Cette Leadville 100 arrive vite. À l’heure où l’on se parle, c’est votre prochain objectif. Dites-nous pourquoi cette course vous tient tant à cœur, et pourquoi elle est tellement célèbre aux USA d’une manière générale ?
Dave Mackey : La course existe quand même depuis 36 ans. Elle est plus vieille que la Hardrock Hundred Mile Endurance Run et presque aussi vieille que la Western States® 100-Mile Endurance Run. Mais elle fait aussi partie de ce qu’on appelle le « Grand Slam of Ultrarunning », avec 4-5 des courses les plus importantes du pays. Je vis à peine à deux heures de Leadville. Elle se déroule dans ma communauté. J’ai fait beaucoup de courses de distances inférieures à 100 miles (170 km, ndlr) mais j’ai quand même participé à quelques 100 miles réputés, comme cette WS100 par exemple, où je fais 4 en 2012, 8 en 2011, et surtout 2 en 2004 (il arrive une bonne heure après Scott Jurek mais aussi presque une heure avant Hal Koerner, ndlr).
VO2run : Mais c’est plus dur que la Hardrock ou pas ?
Dave Mackey : Non non, la Hardrock est plus dure, beaucoup plus dure. La Hardrock représente un sommet dans les 100 miles américains. Leadville est plus roulant, beaucoup plus accessible. Il y a environs 2/3 de dénivelé en moins qu’à la Hardrock, pour la même distance. Et puis même si Leadville se court aussi en altitude, ça monte quand même beaucoup moins haut, et les sentiers sont moins techniques. Leadville a plus de coureurs par contre. C’est une toute autre dimension que la Hardrock. Et puis Leadville 100 tourne autour de la ville de Leadville alors que la Hardrock 100 passe de petites villes en petites villes après le départ à Silverton.
VO2run : Je me suis rendu compte que les médias de votre pays ne parlaient plus tellement de vous aujourd’hui. C’est logique d’une certaine manière parce que vos performances ne sont bien entendu plus aussi bonnes qu’avant. En revanche, on se rend compte sur les courses, et cela se voit très bien dans le film “Leadman, the Dave Mackey story” dont on parlera tout à l’heure, que les gens vous aiment, qu’ils vous encouragent, que vous les inspirez. Vous êtes d’accord avec cette description ?
Dave Mackey : Je me moque pas mal d’être dans les médias ou pas. Je suis moi-même, je continue à être moi-même, je fais mes trucs, mes courses, je vis ma vie, avec ma famille, mes amis. Quand on frôle la mort comme je l’ai fait, je crois qu’on apprend à apprécier davantage la vie. Mon comeback dans ce sport a démarré trois ans après, l’année dernière. En 2018, j’ai fini Bandera 50 km, Jemez Mountain, un autre 50 km, le 50 miles de Leadville qui s’appelle Silver Rush, le Moosalamoo Utra 36 miles et puis Leadville 100, la course dont on parlait. Avant ça, depuis mon accident, je n’avais plus rien fait. Ma dernière course, c’était le Marathon Des Sables début avril où j’ai fini 12ème, quelques semaines à peine avant ma chute. Donc, oui, je suis d’accord avec vous : les médias spécialisés ne parlent plus trop de moi. Mais bon. Et après ? J’en ai franchement rien à faire…
VO2run : Et les gens ? Le public et les autres participants sur vos courses, vous ressentez davantage leur chaleur aujourd’hui ?
Dave Mackey : Oui. Vraiment. Cette année, à Leadville, j’ai dû avoir 90% de soutiens et d’encouragements en plus que l’année où j’ai fait deuxième à Western States 100. Les gens viennent beaucoup plus vers moi spontanément. Ça nous a rapproché, ils se sentent davantage proches et concernés que par une victoire au sens classique.
VO2run : Quand on s’intéresse de près à ce qui s’est vraiment passé pendant votre accident, la chute et l’enchaînement des faits qui se sont déroulés, on peut dire que vous n’avez pas eu de chance : le rocher sur lequel vous posez le pied n’avait jusque-là jamais bougé, vous tombez d’assez haut et, en plus de ça, il vous re-tombe dessus. Vous êtes retourné à l’endroit précis où c’est arrivé ? Et qu’est-ce que vous avez ressenti ?
Dave Mackey : Ah mais j’y retourne tout le temps ! D’ailleurs au moment où je vous parle, je suis en train de le regarder.
Recueilli par Gaël Couturier
INTEGRALITE DE L’INTERVIEW A RETROUVER DANS VO2 RUN 259 DISPONIBLE ICI