Mondial de Moscou : Marathon femmes, Valeria Streano médaillée d'argent, une bonne ou mauvaise surprise !
Même si elle était crédité d’un temps de 2h 23’44’ réussi à Rotterdam en 2012, personne n’attendait l’italienne sur le podium de ce Mondial. Décryptage de cette performance réalisée dans des conditions difficiles. Dans l’histoire moderne des grands marathons disputés dans le cadre des J.O. ou des Mondiaux, peu ont échappé à la problématique de la chaleur.
Quelques exemples, Tokyo en 1991, Barcelone l’année suivante ou encore Stuttgart en 1993. Plus loin dans le passé, Melbourne bien sûr, Los Angeles et ces images épiques d’un Carlos Lopes ou d’une Joan Benoit Samuelson anoblis par la victoire mais crucifiés par la douleur.  Sans oublier Athènes en 2004 sur ce parcours mythique où plus d’une ambition brûla sur cette route transformée en bûcher. Citons Paula Radcliffe et Paul Tergat, donnés favoris mais découpés sans pitié au chalumeau.Le marathon peut s’écrire sur fond de tragédie lorsque le mercure grimpe en des hauteurs où tout à chacun n’aspire qu’à se trouver un coin de fraîcheur.Sur ce grand boulevard épousant les berges de la Moskova, Valeria Straneo aurait pu connaître le pire des sorts. Celui que l’on réserve à ceux et celles qui osent défier cette trilogie maudite, chaleur, soleil et humidité. Elle s’en est allée ainsi, dès les premiers cents mètres, en un rythme personnel, du fait sur mesure, du cousu main. Sur un rythme que même le meilleur des lièvres n’aurait pas assumé avec autant de régularité.
De toute évidence, cette italienne de 37 ans, se connaissait bien. A la perfection même. Avalant ces allers et retours avec une forme d’insolence presque caractérisée. Sûre et certaine de son coup. Ainsi, la caméra pilote suivant la progression des leaders se fixa sur cette longue foulée qui jamais, au grand jamais, ne se rétractera sous l’effet de la fatigue, de la douleur et de la chaleur bien entendu. Valeria Straneo réalisait même, d’un point de vue strictement chronométrique, la course parfaite, un negativ split réussi à deux secondes près, 1h12’58» et 1h 13’00». Autre indice, la marathonienne qui avait préparé ce Mondial dans l’air raréfié des hauts plateaux du Kenya, se payait même le luxe d’accélérer entre le 30ème et le 35ème km, son meilleur 5000 m, soit 17’04». Sans doute pour tester la résistance de la kenyane Edna Kiplagat partie avec plus de prudence, alignant quant à elle un 16’43» pour recoller aux avants postes et voir de quel bois se chauffait cette italienne méconnue sur la scène internationale.
Au final, la championne du monde en titre, dans une stratégie d’attente s’envolera dans les deux derniers kilomètres maintenant une dauphine ne s’avouant vaincue que pour 14 secondes.Alors comment interpréter la performance de Valeria Straneo qui dans un tel contexte, aura fait jeu égal avec Edna Kiplagat qui a déjà couru en 2h 19’50»et 2h 21’32» cette saison ?
Dans ce tunnel de chaleur et d’humidité, au pied des ginguettes et des vedettes naviguant sur la Moskova, l’italienne affiche le plus petit différentiel entre son record personnel, 2h 23’44» (en 2009 à Carpi elle valait encore 2h 41’15») et sa performance du jour, 2h 25’58», soit 2’14» alors que Edna Kiplagat perd 4’12», tandis que la moyenne globale sur les 15 premières est de 6’50».
C’est le petit indice qui limite l’enthousiasme (sauf du côté italien!!!) et fait basculer les commentaires avec une pointe de doute à l’encontre d’une telle performance réalisée par une athlète obtenant sa première sélection aux Europe de cross à Velenje en 2010 où elle termine 10ème. A l’inverse d’une Edna Kiplagat déjà sur un podium mondial chez les juniors, seconde en 1996 sur 3000 mètres. Dans l’histoire de ce Mondial, sur les 42 marathoniennes qui ont eu la joie de monter sur le podium, jamais une athlète n’avait créé une telle surprise. Est ce dans la logique du marathon qui parfois réserve sa petite part d’inconnu dans les lambris de la souffrance.
Texte Odile Baudrier Photo Gilles Bertrand