Lamote en finale, Tavernier en bronze
L’athlétisme féminin a redoré des couleurs à l’athlétisme français à Pékin. Rénelle Lamote s’est qualifiée avec brio pour la finale du 800 mètres, alors qu’Alexandra Tavernier a glané le bronze au lancer de marteau, soit la deuxième médaille pour l’équipe de France après celle de Renaud Lavillenie à la perche. Sans oublier la qualification de la triplette bleue en finale du 110 m haies.
Sur 800 m, le demi-fond français tient peut-être le pendant de Pierre-Ambroise Bosse chez les femmes. Rénelle Lamote n’est peut-être pas recordwoman de France, n’a pas la même faconde que son illustre acolyte, mais elle aussi est championne d’Europe espoir et disputera la finale des Mondiaux sur le double tour de piste samedi (19h15, 13h15 en France).
Dans l’histoire, seules deux Françaises se sont qualifiées pour une finale planétaire sur 800 mètres – Jeux Olympiques ou championnats du Monde. Patricia Djaté, qui détient le record de France avec son très rapide 1’56’’53, avait terminé au pied du podium en 1995 à Göteborg, puis sixième l’année suivante à Atlanta aux Jeux Olympiques.
La seconde est Maryvonne Dupureur, qui brilla à une époque où les Mondiaux n’existaient pas. Elle était montée sur la deuxième marche du podium aux JO de Tokyo en 1964, puis avait pris la huitième place quatre ans plus tard à Los Angeles.
La fin de la course de Rénelle Lamote :
Il y en aura désormais une troisième. Après les séries, on avait eu la sensation que Rénelle Lamote manquait de jus. « J’avais pourtant de bonnes jambes, je sens que je suis prête » avait-elle objecté (lire ici).
Lors du point presse d’avant championnat (lire ici), elle regrettait de ne pas avoir trouvé la course idoine pour claquer son record personnel. Ce soir à Pékin, l’athlète coachée par Thierry Choffin a fait d’une pierre deux coups un an après son élimination à ce stade de la compétition aux championnats d’Europe à Zurich. Un marqueur indélébile dont elle s’est servie cette saison pour se transcender à l’entraînement. « ll me manquait de l’expérience et j’étais quand même un peu spectatrice de l’évènement » soulignait-elle dans le semaine.
« Je suis tellement mieux quand je vois toute la piste que je me suis restée devant »
Elle fit montre d’un aplomb considérable. D’emblée, elle prit la course en main. Quoi de mieux en fait que d’être devant, pour éviter les bousculades impromptues, les écueils en tout genre, a fortiori lorsque l’on n’aime pas ce type de course, comme a pu le mettre en relief sa course en série mercredi. « Mon coach m’avait dit : si ça ne court pas, tu passes et tu mènes l’allure, pas trop vite pour pas non plus que je me grille. Sauf que ça a couru et je n’arrivais pas à me rabattre comme je le voulais. Je voyais que les filles me mettaient la pression. J’avais tellement peur d’être enfermée. Je déteste çà. Je suis tellement mieux quand je vois toute la piste que je me suis restée devant ».
Un passage en 58’’54 à la mi-course, une franche relance pour maintenir le tempo dans la ligne opposée et elle résista au retour de ses adversaires dans l’ultime ligne droite. « J’ai vraiment lutté contre le retour des filles ».
Rénelle Lamote coupa la ligne en deuxième position, ex aequo avec la Britannique Shelayna Oskan-Clarke. 1’58’’86, 3e chrono français tous temps juste devant les 1’58’’93 d’Elodie Guégan. « Je ne voulais pas qu’on se dise que j’étais une fille de meetings. Je voulais me prouver à moi-même et aux autres que je pouvais être bonne en championnats ». Ses coéquipières avaient raison : elle n’avait pas encore démontré tout son potentiel chronométrique cette saison (lire ici).
La voilà donc qualifiée pour une finale où la concurrence sera féroce, car c’est allé très vite dans les autres demies, et notamment la troisième, avec la victoire de la Canadienne Melissa Bishop (1’57’’52), record national à l’appui, devant la Bélarusse Marina Arzamazova (1’57’’54) et la leader du bilan mondial Eunice Sum (1’57’’56). « Si je me dis que c’est du bonus, je vais peut-être me contenter de moins bien que ce que je pourrais faire. Je vais y aller en me disant que je cours pour gagner, pour être parmi dans les trois premières. Si ça marche, c’est magnifique ; si ça ne marche pas, j’aurais quand même été finaliste aux Mondiaux ».
La 3e demi-finale en vidéo :
Alexandra Tavernier au rendez-vous
Rénelle Lamote a 21 ans et l’avenir devant elle. Tout comme Alexandra Tavernier, qui a décroché le bronze au marteau, soit la deuxième médaille de la délégation tricolore. « J’espère que ça va donner des idées aux jeunes qui arrivent. Je veux que le marteau français évolue, soit un peu plus mis en avant » a relevé celle qui fut aussi championne d’Europe espoir à Tallinn. Elle a lancé son engin à 74,02 m au premier essai, presque comme lors des qualifications (74,66 m). Son regret ? Ne pas avoir amélioré le record de France de Manuela Montebrun (74,66 m), double médaillée de bronze sur la discipline en 2003 et 2005 (après le déclassement pour dopage de Kuzenkova).
« Le boulot était fait au premier essai. C’est franchement sa force. Après, pour aller plus loin, il faut faire des trucs que l’on ne sait pas faire. Donc on prend des risques. On essaye, on cherche. Il n’a pas manqué grand-chose au 3e essai –je pense qu’il y a 75,5 – 76 m. C’est une guerrière. Elle se transcende dès qu’il y a de la compète » relève le manager des lancers Gilles Dupray, qui n’a pas manqué de saluer le travail entrepris par Walter Ciofani (qui n’a pas se rendre à Pékin) et actuel coach de Tavernier.
Une troisième médaille pourrait venir sur le 110 m haies. Sur les huit finalistes, trois Français seront en France en finale demain (21h20, 15h20 en France). Historique – seuls les Américains l’ont fait dans le passé- après le triplé cet hier aux Europe indoor (lire ici). Dimitri Bascou (vainqueur de sa demie en 13’’16), Pascal Martinot-Lagarde et Garfield Darien (tous deux troisième de leur demie en 13’’17 et 13’’25, qualifiés au temps) auront tous les trois une chance de monter sur le podium dans une épreuve très dense, où vraiment tout peut se passer. Et dire que Thomas Martinot-Lagarde, 7e en 2013, et le prodige Belocian, sont restés sur le carreau…
Enfin, le champion d’Europe du triple saut Benjamin Compaoré s’est classé douzième avec un triple bond à 16,63 m.
Photo : © Getty Images for IAAF.