Dopage : la Russie provisoirement suspendue
A l’issue de la publication lundi du rapport de la commission indépendante de l’Agence Mondiale Antidopage (présidée par Dick Pound) mettant au jour un dopage organisé en Russie et une féroce corruption, le tout nouveau président de l’IAAF (la Fédération internationale d’athlétisme) Sebastian Coe se devait de réagir.
Il a convoqué ce vendredi 13 novembre un conseil extraordinaire de l’IAAF (composé de 27 membres), par téléconférence, chargé de se prononcer sur la suspension ou non de la Russie des futures compétitions internationales, sanction préconisée par la commission indépendante de l’AMA.
Sans surprise, le Conseil de l’IAAF a décidé que la Russie était provisoirement suspendue de toute compétition internationale, Jeux Olympiques inclus. 24 membres ont pris part au vote : 22 membres ont votés pour cette suspension, 1 a voté contre alors que le membre russe n’avait pas le droit de participer au vote.
La Russie s’est également vue retirer l’organisation de la coupe du Monde de marche ainsi que des championnats du Monde juniors qui devaient respectivement se dérouler en 2016 à Chekbosary et à Kazan (ces deux évènements auront lieu soit dans un autre pays, soit seront annulés).
Les Russes devront remplir un certain nombre de critères afin de participer de nouveau aux compétitions internationales. Critères qui seront évalués par un expert antidopage indépendant norvégien (Chair Rune Andersen), trois membres du conseil de l’IAAF qui seront nommés dans les prochains jours, comme le souligne le communiqué de l’IAAF.
Il est difficile cependant de penser qu’aucun athlète russe ne sera effectivement en lice lors des prochains Jeux Olympiques de Rio, au regard de l’influence sur la scène internationale de la Russie, à tous les niveaux (politique, économique, sportif : la Russie est par exemple le prochain organisateur des Mondiaux de football en 2018, même si l’attribution de cette Coupe du Monde fut critiquée).
Moscou a ainsi accueilli en grandes pompes le premier Forum mondial des Olympiens en octobre (lire ici et là).
Sebastian Coe devait donner des gages de crédibilité : asseoir ses mots –il se veut un fervent pourfendeur du dopage- par des actes, d’autant qu’il a été vice-président de la Fédération internationale entre 2007 et 2015, et est accusé soit d’avoir fermé les yeux, soit d’avoir été incompétent (un journaliste américain l’a ainsi tancé lors d’une interview sur une chaîne de télévision américaine).
Changement de gouvernance pour une vraie lutte antidopage?
C’est un premier pas qui en appelle d’autres. En effet, si tant de cas de dopage ont été cachés et ont notamment permis à certains athlètes russes de disputer les Jeux Olympiques 2012, c’est parce qu’un haut degré de corruption régnait dans les plus hautes sphères de l’IAAF comme l’a souligné le rapport (une enquête est actuellement en cours, l’ex président de l’IAAF Lamine Diack a notamment été mis en examen la semaine passée pour corruption et blanchiment d’argent, alors que l’ancien responsable de la lutte antidopage à l’IAAF, le médecin français Gabriel Dollé, a lui aussi été mis en examen alors que 87 000 euros en liquide ont été retrouvés à son domicile lors d’une perquisition.
Sans compter qu’un nouveau rapport est attendu pour la fin de l’année, où le Kenya serait ciblé. N’oublions pas en effet que Dick Pound avait dit que la cas russe n’était « que la pointe de l’iceberg ; la Russie et l’athlétisme ne sont pas les seuls à avoir un problème avec le dopage »
L’une des (vraies) solutions pour éviter tous ces scandales serait un changement de gouvernance : que la lutte antidopage soit entièrement externalisée afin d’éviter tout conflit d’intérêt. Mais là, Sebastian Coe n’y parviendra pas tout seul…
Photo de une : Photo Getty Images for IAAF.