Baptiste Mischler, athlète du week-end
Baptiste Mischler (dossard 39, ici aux France de cross) avait déjà impressionné avec ses 1’47’’51 sur le double tour de piste (5e performance junior française tous temps) fin mai. La performance qu’il a réalisée, samedi dernier à Amiens est peut-être (sans doute) encore plus frappante.
Le vice-champion d’Europe junior du 1 500 mètres 2015 est descendu sous les 3’40’’ sur sa distance de prédilection : 3’39’’58, précisément. Dans l’histoire de l’athlé tricolore, il est le deuxième junior à réaliser pareille performance, derrière les 3’38’’01 de Samir Dahmani (2010 à Bruxelles), et devant un certain Jacky Boxberger, à une époque où les chronos manuels faisaient encore foi (3’40’’8, 1968), Bryan Cantero (3’41’’30, 2010) ou encore Florian Carvalho (3’41’’48, 2008).
Partie intégrante de cette génération juniors (96-97-98) très talentueuse et éclectique, Baptiste Mischler brille aussi dans les labours, où il a glané le titre de champion d’Europe par équipes en décembre dernier à Toulon, terminant 21e…et 6e Français (il pris la 5e place aux France au Mans en mars derrière un Fabien Palcau de gala et un Jimmy Gressier sur un pied), Entretien avec le placide athlète de 18 ans, humble et pondéré devant ses chronos.
Comment s’est déroulée la course samedi ?
Je l’appréhendais car nous étions nombreux (19 !, ndlr). J’avais peur des bousculades mais ça s’est finalement bien passé. Je suis resté plutôt derrière pour les éviter, et aussi pour éviter de m’exposer sur le départ, car le lièvre devait partir sur des bases 2’22’’, ce qui était un peu rapide pour moi.
Mes bases étaient 2’27’’ – 2’28’’ au kilo : avec mon entraîneur, on s’était fixé 3’40’’-3’41’’ au vu des entraînements, et du fait que j’avais fait 3’43’’09 à Montbéliard la semaine dernière.
Je suis passé en 2’28’’, j’ai senti que j’avais des jambes sur les 500 derniers mètres, du coup je n’ai pas hésité à revenir sur le groupe de tête et à embêter les seniors qui étaient devant (il a pris la 4e place de la course), en faisant un gros dernier 500, en 1’11’’.
Qu’est ce que cela vous fait de figurer à la deuxième place tous temps chez les juniors ?
Ça ne me change rien du tout. La saison vient à peine de commencer, nous sommes que début juin, c’est encore long. Pour l’instant, je ne me pose pas trop de questions, je reste encore très concentré sur mes objectifs. Je sais que le chrono est très bon, que j’ai fait quelque chose de fort, mais je ne compare pas à Samir Dahmani ou Jacky Boxberger, qui a fait une très grande carrière.
Moins de 3’40’’ et 1’47’’ sur 800, ce sont des chronos que vous aviez envisagé avec votre coach (Hubert Steinmetz) pour cette saison ?
Non, on visait autour de 3’40’’- 3’41’’ et j’imaginais 1’49’’ sur 800 m. Je gagne deux secondes sur les objectifs que je m’étais fixés. Ça me met un peu moins de pression pour la suite de la saison.
Je vais placer une semaine de récup puis un nouveau cycle d’entraînement. Le prochain objectif, ce sont les championnats de France (juniors) dans trois semaines (1-3 juillet à Châteauroux). Je ne vais pas faire les Elite (24-26 juin à Angers), qui sont une semaine avant, car vu que les France jeunes sont sélectifs pour les championnats du Monde, je suis obligé d’y participer. Je suis encore junior, j’aurai encore le temps de faire les Elite.
Aux Mondiaux juniors avec le « même état d’esprit » qu’en 2015
Vous êtes actuellement quatrième au bilan mondial juniors sur 1 500 m. Avec votre pointe de vitesse, envisagez-vous un podium aux Mondiaux juniors (19-24 juillet à Bydgoszcz en Pologne) ?
Beaucoup de personnes m’en parlent. L’objectif est de faire pourquoi pas une place de finaliste. Comme l’an dernier (aux Europe juniors, médaillé d’argent), je ne vais pas me mettre trop de pression, pas me poser de questions, et y aller avec le même état d’esprit, sans rien avoir à perdre.
Le chrono peut encore descendre, j’ai encore un peu de marge car j’ai perdu un peu d’énergie à Amiens à me replacer plusieurs fois, à jouer des coudes. Je peux grappiller quelques dixièmes, mais de là à faire le record de France, je ne sais pas trop. Mais maintenant que j’ai réalisé le chrono, je me concentre surtout sur les différents championnats.
Quels sont vos conditions d’entraînement ?
Je suis dans mon club à Brumath (Bas-Rhin), où il y a une piste en cendrée qui ne fait pas 400 m. Je m’entraîne sept fois par semaine (une fois par jour), dont quatre fois à Brumath. Il y a dans le groupe Julian Ranc, qui fait 1’48’’(07) sur 800 m, c’est sympa, on se tire la bourre sur les séances spécifiques un peu plus 800 m.
Je m’entraîne avec mon frère (Timothée, qui a fait les minima pour les Europe cadets sur 2 000 m steeple ; 5’53 »93, en tête des bilans français cadets) l’hiver, quand on fait notamment des séances plus longues, spé cross, mais moins l’été car nous ne sommes pas sur les mêmes disciplines.
Vous faites des études à côté ?
Je suis à l’INSA (école d’ingénieur) à Strasbourg. Je suis en première année –je viens de finir la semaine dernière- que j’effectue en deux ans, ce qui me permet d’avoir du temps pour m’entraîner, pour la récupération etc…
Forcément, j’aimerais bien être sportif de haut niveau (et ne pouvoir faire que ça), mais continuant mes études, je pourrais plus tard faire un choix en fonction de mes performances, et avoir une solution de secours.
Interview : Quentin Guillon.
Photo : Yves-Marie Quemener.