Mondial de Moscou : 3000 mètres steeple, transition réussie pour Yoann Kowal
Yoann Kowal voulait tourner la page du 1500 m et revenir à ses premiers amours, le 3000 m steeple. Après un virage abordé dès l’an passé, celui-ci est définitivement devenu un vrai steepler accrochant enfin une place en finale mondiale le comblant de bonheur.
Petit rappel. Nous sommes le mardi 30 juillet, Yoann Kowal réalise «sa grosse séance sur des barrières». Quentin Guillon, sous l’œil de VO2 présent à Font Romeu décortique cette séance qualifiée de singulière. Yoann se confieJ’aime bien ce style de séance car ça change tout». Avec une consigne: changer d’allure.
Rentrons dans le détail de la séance: un premier 800 m avec 1’0» au premier tour et 1’02» au second alors que le 900 m avec passage de barrières est effectué par tranches de 300 mètres en accélération progressive. Yoann poursuit: «Il faut travailler ces changements d’allure parce que dans toutes les courses, il faut finir vachement vite. On n’a pas fait trop de séances de ce type sur le steeple, on en a fait beaucoup sur le 1500. Et ça se passait super bien.
L’année passée, le tandem Kowal Petit-Breuil est déjà dans cette logique peu avant les J.O. de Londres avec à J-10 un corps de séance composé de 3 x 800 m avec 500 m sur les bases de 3’45» (donc 1’15 au 500) et les derniers 300 mètres en allant de plus en plus vite à chaque 100 mètres.
Yoann Kowal est redescendu de Font Romeu jeudi 1er août, à 11 jours de sa série, sans bousculer les habitudes avec une dernière séance à J-10. Quentin Guillon assiste à nouveau à cet entraînement hautement qualitatif, la dernière broderie sur ce bel habit de lumière. A savoir un mix de spé 3000 et spé 1500. Un premier 500 pour se mettre dans l’allure puis 2 000 m et 3 x 300 m avec comme récupération 3’, 8’ et 1’10 entre les 300.
Pourquoi ce “mélange“détonant ? Réponse de l’entraîneur qui avec Yoann a décortiqué la problématique du steeple: « J’aime bien tester. Le but est de retrouver les sensations lactiques tout en faisant beaucoup de volume avant. Avec un 2 000 avant, tu ressens vraiment bien ces sensations» explique Patrick Petit-Breuil, lièvre de luxe en vélo sur le 2000 m. Ne pas se faire bouffer, Patrick Petit-Breuil lui avait répété «devant tu as des lions». La phrase est revenue comme une infinie mélopée à rendre fou. Toute la nuit au point de ne pas trouver le sommeil. Des textos à sa copine toujours pas arrivée, des textos à Philippe Dupont pour se calmer, pour faire taire cette vilaine musique, cette ritournelle qui vous fait perdre les sens. Yoann Kowal a ainsi psychoté toute la nuit pour arriver dans cette troisième série tendu comme un jeune trouffion l’arme au combat, malgré l’expérience de trois grands championnats d’été. Rien n’y fait, comme un premier saut dans le vide pour le base jumper. Mais dès les premières foulées, en entendant son amie Marianne crier à chacun de ses passages, Yoann a bien senti que les jambes tournaient rond, que la fraîcheur était là, qu’il était en capacité de retranscrire ce qu’il avait appris à l’entraînement. Dans une série compliquée (elles le sont toutes?!), Yoann a donc contrôlé, comme le menuisier appliqué sur son tour. Ne pas affoler les kenyans, ça ne sert à rien, en restant à sa place, en contrôlant le marocain orsque celui-ci est revenu à son contact. «J’ai entendu son coach lui donner une consigne», il était temps pour Yoann de réagir pour embrayer et répéter ce changement rythme appris et mille fois composé sur la piste de Font Romeu et de Périgueux. Première grande année de steeple, première finale dans la poche, Yoann pouvait lever deux bras haut dans le ciel, en portant son regard vers son clan. Une qualif le jour anniversaire de son père, un beau cadeau pour celui qui fut lui aussi jeune steepler talentueux et qui fut un jour, le tombeur de Joseph Mahmoud.
Texte Odile Baudrier Photo Gilles Bertrand