Où s’arrêtera Emeline Bauwe ? Portrait d'une junior qui joue dans la cour des grandes
Dans le sillage de records personnels améliorés à coup de (larges) secondes, la jeune Perpignanaise a réalisé un hiver exceptionnel, avec le titre national à Lyon le week-end dernier et une deuxième place mi-février aux Elite sur 800 m, agrémenté du record de France junior. Mais sa préférence se dirige vers le 400 m haies…
Cet hiver, les juniors auront marqué de leur empreinte les championnats de France Elite. Gaétan Manceaux, deuxième du 800 chez les hommes, Emeline Bauwe, également deuxième d’une course remportée par Lisa Blameble, jeune espoir de vingt ans. Est-ce à dire que les jeunes ont pris le pouvoir? Pas encore, certain(e)s athlètes ayant fait l’impasse sur la salle. Mais force est de constater que la relève est déjà là. «Emeline n’a pas une progression par palier» souligne son coach Patrick Sarrat, qui l’entraîne depuis quatre ans.
«Je ne luis vois pas trop de limites. Ses progrès sont très impressionnants alors qu’elle ne s’entraîne que trois fois par semaine, ce qui est très léger par rapport aux autres athlètes. Je suis même admiratif. Elle gagne 6-7 secondes par saison».
2’11’’55 l’été dernier, 2’05’’39 à Aubière cet hiver, on n’ira toutefois pas jusque à écrire que la barrière des deux minutes sera franchie de sitôt. «Je la vois bien en 2’02-2’03 cet été» poursuit t-il.
Athlète éclectique
A Aubière, Emeline Bauwe a en tout cas fait très fort, abaissant de trois secondes son propre record de France junior battu une première fois fin janvier, en sus de monter sur le podium. «J’avais été très impressionnée lors de mes premiers Elite (hiver 2012, 8e de la finale en étant encore cadette). Je m’étais beaucoup occupée des autres filles. Pas cette fois-ci. Leurs chronos étaient meilleurs que le mien mais je sais que dans une course tout peut se passer. Je n’étais pas stressée, j’étais motivée».
Et elle n’était pas loin de remettre ça le week-end dernier à Lyon, à l’occasion des «France» jeunes, s’imposant avec plus de quatre seconde d’avance (2’06’’51) tout en étant en avance aux 600 mètres sur sa nouvelle marque… « L’objectif était d’être championne de France. Néanmoins, j’ai fait durant la semaine précédente la même séance que celle avant les Elite. J’ai fait de meilleurs temps. Mon entraîneur m’a donc dit qu’il était possible de battre le record de France. Mais le dernier tour était un peu difficile».
Ce qui est paradoxal chez cette athlète éclectique –qui concourt aussi sur les épreuves combinées- c’est qu’en dépit de performances épatantes sur 800 m, sa préférence se dirige vers le 400 m haies, discipline sur laquelle elle possède il est vrai de solides références, avec un record personnel à 59’’48. «Le 400 haies, c’est du sprint long et en même temps on ne s’ennuie pas, ça passe beaucoup plus vite qu’un 800 m. Quand je cours un 800 et qu’il y a du monde, ça ne me dérange pas. Mais quand je suis seule, c’est un peu «ennuyant». Je faisais du 1 000 m à mes débuts et j’en ai peut-être trop fait» confie t-elle. Ne parlons pas du cross alors…«Je n’ai pas le courage, c’est trop dur pour moi!».
«Il faut qu’elle se fasse plaisir. Autant qu’elle aille là où elle a envie» précise Patrick Sarrat.
Travailler tactiquement
C’est donc sa place au bilan européen qui déterminera le choix de s’aligner sur 800 mètres ou sur 400 m haies aux championnats d’Europe junior cet été. La lycéenne, en Terminale S avant de se diriger vers «une prépa kiné» l’an prochain, pourra s’appuyer sur l’expérience vécue début mars à Ancone lors du match international avec l’Italie et l’Allemagne. Où elle a pu mesurer les progrès qu’il lui faut réaliser au niveau de la tactique (2e de la course), élément prépondérant dans la performance lors des grands championnats.
«J’ai mal couru. Il n’y avait pas mon coach et j’écoute toujours mon entraîneur. C’était ma première course tactique. Aux Elite, les deux filles sont parties devant et j’avais juste à suivre. A Ancone, on était toutes en groupe et j’étais souvent au 2e couloir ».
Si elle a toujours baigné dans l’athlétisme, Emeline Bauwe ne suit pas pour autant l’actualité de son sport. «Je m’intéresse juste aux performances des athlètes de mon club. Depuis que j’ai fait les Mondiaux cadets (en 2012), je suis un peu plus. J’ai par exemple regardé les JO à Londres. La dernière fois, je mangeais avec quelqu’un et je ne savais pas qu’il était connu dans l’athlétisme. On m’a dit après que c’était (Samuel) Coco-Viloin…». Sa culture athlé pourrait cependant vite s’enrichir à mesure que ses résultats suivent la même dynamique actuelle…