Rio 2016 : Lavillenie en argent, Bosse au pied du podium
Soirée difficile pour l’athlétisme tricolore à Rio. Grand favori, Renaud Lavillenie a dû se contenter de l’argent à la perche, battu par le Brésilien Thiago Braz, qui campait un rôle d’outsider mais que l’on n’attendait pas à 6,03 m. Quelques instants plus tôt, Pierre-Ambroise Bosse avait tutoyé le podium sur le double tour de piste, au terme d’une finale irrespirable.
Est-ce en raison des vingt minutes de retard que le Kényan Alfred Kipketer a mis les watts dès le coup de feu ? Comptait-il singer avec ce départ canon Sammy Tangui, lièvre et grégario attitré de David Rudisha au temps de sa splendeur (que ce dernier a d’ailleurs retrouvée), et faire ainsi la trace au champion olympique sortant et recordman du Monde ? C’est d’emblée ce qui nous a traversé l’esprit. Pierre-Ambroise Bosse l’a aussi susurré après-coup, tout en précisant que Kipketer n’avait pas laissé passer son « leader » si facilement, dans le virage sitôt que la cloche eût retenti, après un passage en apnée en 49’’23’’ à la mi-parcours.
Le recordman de France était de son côté placé dans la foulée du patron. Et lorsque ce dernier plaça une énorme banderille ligne opposée, à 300 mètres du but, Pierre-Ambroise Bosse se cala dans sa foulée, fournissant un effort considérable pour s’accrocher aux basques du Kényan. « Je visais l’or » a-t-il expliqué par la suite.
Voilà pourquoi il prit des risques et suivit ce foudroyant démarrage. Et voilà pourquoi il « craqua » – tout est relatif- dans une dernière ligne droite irrespirable, débordé à la fois par le champion olympique 2012 du 1 500 mètres Taoufik Malkhoufi, qui s’empara de l’argent en 1’42’’61 (ce dernier est entraîné par Philippe Dupont, qui est tout de même manager du demi-fond français, ce qui interpelle quelque peu, voire beaucoup ; la situation ainsi résumé paraît ubuesque avec un athlète français qui se mêle à la lutte pour un podium olympique, où figure parmi ses principaux adversaires un concurrent étranger entraîné par le patron du demi-fond français, qui est donc censé placé le coureur hexagonal dans les meilleures dispositions !!), et par la très grosse surprise américaine Clayton Murphy, inconnu au bataillon jusqu’alors et qui a retranché plus d’une seconde et demi à son record personnel, le portant à 1’42’’93 pour glaner le bronze (il avait sorti en demi-finale le double champion d’Europe et médaille de bronze mondial Adam Kszczot).
Bosse, gorgé « d’acide lactique » dans les jambes, coupa la ligne en 4e position, en 1’43’’41, meilleur chrono de sa saison. « J’ai vécu ma finale olympique pleinement » a-t-il souligné. « Je n’ai pas de regrets et c’était important de ne pas en avoir ».
Lavillenie, des sourires à la stupéfaction
Cinquième l’an passé aux Mondiaux de Pékin (lire ici), passé à côté de ses championnats d’Europe à Amsterdam (davantage en raison des conséquences de son virus contracté deux semaines avant aux France que pour un « blocage » mental), il a tenté sa chance à fond, comprenant dans la dernière ligne droite que la victoire lui échapperait, devant la force de frappe de David Rudisha, qui double la mise en 1’42’’15, un chrono monstrueux en finale olympique, finalement pas si éloigné que ses dingos 1’40’’91 (record du Monde) claqués à Londres il y a quatre ans, où la chaude ambiance l’avait porté.
Sans sa très violente attaque ligne opposée, Bosse, qui mit quelques minutes à récupérer, ce qui ne l’empêcha pas de distiller au micro de France TV quelques saillies dont il est coutumier, aurait pu (dû) s’offrir cette médaille olympique tant convoitée….Les regrets affleureront peut-être dans les heures à venir…
Un peu plus tard dans la nuit brésilienne, lors d’un concours à rallonge, à la fois retardé par la pluie, le vent et des soucis techniques, on crut longtemps que Renaud Lavillenie, qui restait sur un zéro lors de son dernier concours en grand championnat (aux Europe à Amsterdam), allait réaliser le doublé après son titre à Londres en 2012.
Dans la foulée d’un début de concours immaculé avec quatre sauts franchis au premier essai, le recordman du Monde menait les débats avec 5,98 m, soit un record olympique, et (presque) tout le monde pensait que le Clermontois allait cueillir son deuxième titre olympique, ce que le seul américain Bob Richards était parvenu à réaliser dans les années 50.
Le Brésilien Thiago Braz Da Silva, seul encore en course avec le Français, fit l’impasse à 5,98 m. Lavillenie manqua par la suite à deux reprises 6,03 mètres…sauf que Braz effaça cette barre à la surprise générale au deuxième essai !
Lavillenie conserva sa dernière tentative à 6,08 m mais échoua. Les sourires laissèrent soudainement place à la stupéfaction dans le camp tricolore…
Texte : Q.G
Photos : Getty Images © Copyright.