La frustration de Christophe Lemaitre
Christophe Lemaitre n’a pu pleinement s’exprimer lors de ces championnats du Monde, sa préparation terminale ayant été retardée par une première blessure au fessier suivi d’une rechute. Mais il garde toujours le cap.
Eliminé en demi-finale du 100 mètres, Christophe Lemaitre n’a pas non plus passé ce cut sur 200 mètres, ce mercredi 26 août, à la mi-temps des Mondiaux de Pékin. A Pékin, quand on questionnait l’Aixois sur ses ambitions sur son épreuve de prédilection, « finale » et « podium » revenaient en boucle dans les paroles du champion du Monde junior en 2008, qui trois ans plus tard s’était emparé de la médaille de bronze chez les seniors en 2011 à Daegu, record de France à la clé (19’’80). Au point presse la semaine passée, il se montrait confiant, parlant de « tests probants sur sprint ». Mais au fond de lui, l’élève de Pierre Carraz savait pertinemment qu’il n’était pas au top.
« J’ai même pensé déclarer forfait pour soulager tout ça »
S’il a toujours évoqué ces objectifs inatteignables par rapport à la forme du moment, c’était sans doute qu’il ne souhaitait pas se réfugier derrière l’excuse de la blessure. Celle-ci fut bel et bien un frein pour celui qui avait retrouvé ses cannes et son accélération dans le froid norvégien fin juin avant sa première blessure (20’’21), puis en juillet aux France (20’’28) après la première incartade du fessier.
Comme à l’accoutumée, comme aux Europe il y a un an (lire ici), il a analysé avec lucidité son mondial pékinois, qui s’achèvera ce week-end avec le relais 4×100 mètres, où il y aura un coup à faire.
C’était trop juste de passer en finale?
Je n’ai pas eu ma première partie de course. J’avais l’impression de me sentir mieux par rapport aux séries (20’’29 contre 20’’34 en séries) et je ne pensais pas que j’aurais un virage plus compliqué par rapport aux autres. J’ai quand même essayé de mettre un coup d’accélérateur. Je suis un peu revenu mais ceux qui étaient devant étaient trop loin.
Il s’agit d’un problème technique ou d’un manque de jus ?
Je n’ai pas l’impression d’avoir ressenti tous les défauts techniques que j’ai ressentis en série. C’est pourquoi je ne comprends pas pourquoi ça a pêché dans le virage pour que je me fasse manger comme çà. J’ai eu énormément de mal à retrouver le virage que j’ai pu faire cette saison, aux championnats de France ou à Oslo.
Quels sont vos sentiments ?
Je suis très déçu. L’objectif était d’aller minimum en finale.
« Frustrant de ne pas être à 100 % »
In fine, c’est beaucoup d’efforts pour « pas grand-chose » ?
J’ai mis du temps pour récupérer. Ce qui est frustrant, c’est de ne pas être capable d’être à 100% de mon potentiel sur des championnats du Monde où il y a un sprint de bon niveau.
L’année dernière, c’était compliqué. Là, beaucoup de points positifs étaient apparus pendant la saison. Et tous les efforts que j’ai faits pour revenir ont été balayés par des blessures et des rechutes à répétition. C’est frustrant de ne pas profiter de la spirale positive que j’avais commencé à enclencher depuis le mois de juin.
Les blessures ont tout compliqué. Il a fallu gérer tout çà : continuer à s’entraîner, faire attention à la blessure pour ne pas que ça repète. Çà repète, le moral en prend coup… J’ai même pensé déclarer forfait pour soulager tout ça. Mais je me suis dit de continuer, de me battre jusqu’au bout. A froid, je me rappellerais d’où je suis venu et j’en retirerai quelque chose de positif pour la saison suivante.
Regrettez-vous d’être venu à Pékin ?
Ah non, pas du tout. Je suis quand même super content d’être là. J’aurais été très déçu de ne pas y être, de voir tout le monde courir alors que je serais resté dans mon canapé.
Vous allez vous aligner sur quelques meetings d’ici la fin de saison ?
Bien sûr. Ça sera plus pour s’amuser, prendre du plaisir.
Chronométriquement, vous vous sentez capable d’aller vite sur 200 m d’ici la fin de saison pour recouvre un peu de confiance avant 2016 ?
Je ne sais pas. Je pense que ça ne sera pas le but, qui sera plutôt essayer de se remettre dans le bain, de récupérer le temps perdu, de refaire des courses et de retrouver des sensations. On verra si le chrono suit mais je suis capable de courir plus vite que ce que j’ai fait cette saison (20’’21 à Oslo). 20’’00 ? Oui, ça serait bien. Mais le but c’est de vraiment courir et de se remettre dedans.
Photo : Christophe Lemaitre lors des demi-finale sur 100 mètres dimanche dernier (© Getty Images for IAAF).