Romain Courcières, athlète du week-end
Romain Courcières a terminé troisième du marathon d’Annecy dimanche, en 2h17’28’’, alors qu’il devait initialement donner le tempo au groupe de Français (les frères Michaël et Damien Gras ainsi que Nathan Chebet (1) ) jusqu’au 30e kilomètre !
C’était peut-être donc la clé afin qu’un Français réalise les minima pour les Jeux de Rio (2h11’) : se muer en lièvre et terminer la course ! On sourit, mais moins que le marathon masculin français, qui avait connu un fiasco retentissant à Londres en 2012, et ne relèvera pas la tête à Rio dans quelques mois : aucun Bleu n’est descendu sous les 2h15’ cette année, et aucun ne sera en lice aux Jeux Olympiques de Rio ; tandis que seule Christelle Daunay sera au départ côté féminin.
Romain Courcières a donc créé la surprise, en terminant le marathon d’Annecy à la troisième place, alors qu’il ne devait initialement officié qu’en tant que lièvre.
« Si ça va ce matin ? Je viens de faire 20 kilomètres à pied » se marre t-il. « Non, je déconne, mais je ne suis pas plus fracassé qu’après mon premier semi à Barcelone (1h05’02’’ le 14 février). J’ai fait aux sensations. Je devais passer entre 1h07’30 et 1h08’ au semi. Puis on a ralenti l’allure vers le 23e km car ça n’allait pas bien pour Michaël, qui était le seul Français à suivre. Je devais tenir 1h36’ – 1h37’ au 30e km. On en était pas loin mais si on continuait comme ça, on allait passer en 1h38’. J’ai décidé de maintenir l’allure, en me disant qu’il m’aurait en point de mire. Et au 30e, il avait plus d’une minute de retard ».
Foncier, zéro pression et gouffre
Et alors qu’il ne devait pas terminer la course, Romain Courcières a poursuivi son effort. « Il y avait une prime au premier Français. Je me suis dit : “autant que j’y aille et que je voie kilomètre après kilomètre ». Et je me suis dit que j’allais prendre un mur, car je n’avais pris aucun ravito (excepté deux gorgées express et un gobelet au 30e qui a davantage terminé dans le visage que de la bouche, souligne t-il) car je savais que je pouvais tenir 1h30’ sans ».
Au final, la performance est notable, mais trois choses l’une. Le natif de Montauban avait « zéro pression » comme il le relève lui-même. « 30 kilomètres, ça me faisait un bon entraînement ». Il avait prévu de courir dans dix jours les France de 10 000 mètres –mais ne le fera finalement pas, après avoir bouclé ce marathon.
D’autre part, 2h17’28’’, c’est à plus de six minutes des minima olympiques – un gouffre à ce niveau-là. « Je reçois beaucoup de messages de félicitations. Ça me fait plaisir, mais 2h17’, ce n’est rien du tout. Il faut rester les pieds sur terre » abonde t-il.
Enfin, même s’il ne s’est pas préparé spécifiquement, l’athlète coaché par Yannick Kerloch s’adosse à un gros foncier effectué cet hiver, ce qui explique son absence de baisse de régime sur des allures supérieures à près de trois minutes à son record personnel sur semi-marathon.
« Par rapport aux hivers précédents, j’ai fait peu de qualité. J’ai déménagé dans les Pyrénées-Orientales, à Puyvalador (1 600 m d’altitude) et ce n’était pas facile au niveau des températures. Alors que j’ai bossé en tant que saisonnier à la station de ski (à 2 100 m d’altitude). J’ai donc fait beaucoup de footings et de footings vallonnés (avec par exemple des sorties de 1h45’ une à deux fois par semaine, et au total autour de 110-120 km par semaine) et j’ai utilisé tous les cross et les courses pour faire de la qualité ».
Romain Courcières court beaucoup, avec à son actif depuis mi-février trois semi-marathons et un marathon ! (1h05’02’’ à Barcelone ; 62e en 1h07’02’’ aux Mondiaux de semi –« il a fallu dix kilomètres pour que je digère mon premier 3 000 m en 8’35 » – puis 1h05’55’’ la semaine suivante à Nuaillé).
« Il faut vivre »
Ne ferait-il pas mieux de mieux cibler ses objectifs ? « Financièrement, il faut vivre. Faire un gros chrono, ça ne me ramènerait rien financièrement. S’il y a une sélection, je la prendrai –je me battrai toujours pour l’équipe de France-, mais financièrement, ça va me rapporter quoi ? Rien du tout. Et j’ai un gamin, ma femme bosse à côté et je ne peux pas être à côté tous les jours et lui dire “merci“ » développe Romain Courcières, qui tente de vivre de la course à pied depuis la fin de la saison de ski (« ça durera le temps que ça durera. Le jour où j’en aurais marre, j’arrêterai, je retournerai bosser » précise celui qui avait repris les études, obtenant un BAC Pro pour travailler un jour à son compte dans une ferme apicole), et n’envisage pas de se consacrer exclusivement à une préparation marathon.
« Même si je n’ai pas les jambes trop cassées, je vais faire une semaine de repos, puis un peu de vélo et je vais reprendre au Puy-en-Velay (le 1er mai) » conclut-il.
Les résultats du marathon d’Annecy : cliquez-ici.
(1) Michaël Gras a terminé 7e en 2h21’29’’, Nathan Chebet 8e en 2h21’42’’ et Damien Gras 9e en 2h22’10’’.
Photo de une : Romain Courcières aux France de cross début mars où il avait terminé 6e Français.