Michaël Gras, la piste avant le marathon
Blessé et forfait pour le marathon de Paris, Michaël Gras a l’intention d’aller vite sur la piste et sur 10 km avant de mettre de nouveau le cap à l’automne prochain sur marathon.
On le dit et on le répète souvent, le demi-fond est une discipline ingrate. A la différence du sprint, des sauts ou des lancers, bien qu’en forme, le demi-fondeur ne peut pas multiplier outre-mesure les sorties et est tributaire des circonstances de course. Il faut donc persévérer, se montrer patient et trouver l’épreuve idoine. Illustration avec Michaël Gras.
Après une fin d’année 2014 délicate et un début de tendinite à l’adducteur, le multiple champion de France chez les jeunes (cross, montagne, 10 km et piste), 24 ans aujourd’hui, s’est résolu à faire l’impasse sur les championnats de cross et le marathon de Paris, pour lequel il devait faire ses débuts, sa blessure s’accentuant lors du stage fédéral au Portugal fin janvier. « Ça a empiré » raconte –il. « C’était un peu frustrant, mais je n’étais pas encore vraiment dans la préparation. J’en referai un à l’automne prochain. J’ai le temps de faire carrière sur marathon. J’ai pris du repos et j’ai enchaîné sur de nouveaux objectifs sur la piste ».
Le but ? « Avoir une base de vitesse pour ensuite monter sur marathon ». C’est-à-dire être capable d’aller vite sur 5 000 et 10 km pour ensuite être (très) à l’aise, avoir « une marge » sur des passages en 15’30’’ – 16’ sur marathon.
« J’ai passé des séances que je n’avais jamais réussies à faire »
Il réamorce la machine en avril, dispute les France de 10 km à Aix-les-Bains, et recouvre rapidement la grande forme sur le tartan. « J’ai passé des séances que je n’avais jamais réussies à faire ». L’athlète coaché par Patrice Lagarde arrive donc confiant à Carquefou le 19 juin dernier, où il escompte descendre sous les 14’, avec la volonté de se qualifier pour ses premiers championnats de France Elite. « Je tiens absolument à les faire. Avec le marathon, je n’aurais peut-être plus de possibilités pour le faire » explique t-il alors.
« Mais la veille de la course, j’ai commencé à avoir de la fièvre. J’ai passé une mauvaise nuit. Je n’étais vraiment pas bien le matin et j’hésitais même à aller à Carquefou. Sur l’échauffement, bizarrement, je ne me sentais pas si mal que ça. Sur la course, je voyais bien par contre que je ne pouvais pas changer de rythme. Je n’ai fait aucun tour de piste sur les chronos que je voulais faire. Et quand ça s’est emballé à la fin, je n’ai rien pu faire ».
Il bat tout de même son record, qui datait de 2013 (il s’était blessé lors de la saison estivale 2014), 14’20’’ contre 14’22’’. « J’étais quand même déçu car c’était à 20 secondes de ce que je voulais faire. Et j’ai eu du mal à m’en remettre les jours suivants. D’autant qu’il a commencé à faire vraiment chaud ».
« Il me tarde que Damien reprenne »
Mardi 30 juin, deadline pour la qualification aux France Elite (Villeneuve d’Ascq du 10 au 12 juillet), il retente sa chance au meeting de Talence, emmené sur les trois premiers kilomètres par son coéquipier de club Benjamin Malaty (passage en 8’27’’), qui lorgne le marathon de Francfort. Mais il ne parvint pas à maintenir le tempo, sous l’effet conjugué d’un final en solitaire, et, surtout, d’une atmosphère irrespirable –plus de trente degrés à 23 heures, au moment de la course.
Tributaire des conditions de course… « J’ai quand même amélioré tous mes chronos, sur 3 000 m, 3 steeple et 5 000, même si ça reste encore des chronos moyens par rapport à ce que je pense pouvoir faire dans des conditions idéales ».
Michaël Gras lorgne désormais un 5 000 m en juillet, peut-être en Belgique, avant les 10 km de Lille en septembre où il s’était imposé en 2014 (29’28’’). Avant donc ses débuts sur marathon, peut-être aux France à Rennes, avec son frère Damien, qui, avait dû abandonner au marathon de Paris, en raison d’une lombalgie et s’apprête à reprendre l’entraînement. « Ça fait depuis le début de l’année qu’on a pas couru ensemble. C’est difficile de se motiver et de réussir les séances quand on est tout seul. C’est complètement différent. Il me tarde qu’il reprenne » glisse Michaël, alors que le duo a obtenu d’effectuer leur 5e année de médecine en deux ans.
Les aménagements en médecine ? « Psychologiquement, ça fait du bien »
« On a validé les partiels de janvier. On n’a pas passé les partiels de juin et on les passera en juin 2016. Si ça fait du bien ? Ça libère pas mal de temps » sourit-il. S’il ne s’entraîne « pas plus », il n’est pas contraint de boucler sa séance à la va-vite entre midi et deux. « Et on récupère mieux. Psychologiquement, ça fait du bien. Et on a aussi plus de temps pour préparer l’examen classant national pour l’internat (à l’issue de la 6e année). Par contre, on n’a pas d’aménagement au niveau des stages hospitaliers (tous les matins) » poursuit celui qui a entamé lundi un stage d’un mois en psychiatrie à Charles Perrens (à Bordeaux), après un mois de juin en pédiatrie et neurologie à l’hôpital des enfants à Pellegrin (Bordeaux également).
Jongler entre études/vie professionnelle et entraînements, c’est in fine le quotidien de pléthore d’athlètes. « Oui, c’est sûr que si je ne faisais que de l’athlé, je pense que j’aurais un autre niveau. Mais c’est un peu le même problème pour tout le monde, on est obligés de faire quelque chose à côté ».
Tributaire d’autres circonstances, ce coup-ci…
Photo : au second tour des Interclubs sur le steeple (Photo US Talence Athlétisme).