Minima en série pour les juniors-espoirs sur le 5 000 m à Carquefou
Alors que le 5 000 m du meeting de Carquefou fut dynamité par les coureurs des hauts plateaux, les jeunes tricolores ont brillé : trois espoirs ont réalisé les minima pour les Europe, avant que deux juniors ne les imitent dans la série B. Prometteur pour la suite.
Dans l’Hexagone, le 5 000 m, c’est Carquefou. Et le meeting de Carquefou, c’est le 5 000. On s’y presse pour y venir (plus de 30 engagés dans la série B !), on multiplie les appels à l’organisateur Jean-Paul Souchet pour gagner son précieux sésame. Car les conditions sont toujours idoines -fraîcheur et vent quasi nul à 22 heures passées- et la concurrence tant recherchée est toujours présente.
Et au bord du tartan, quand ça siffle et que les tours défilent, puis que ça tamponne sévère sur la fin de course, c’est toujours aussi impressionnant.
Après un premier kilo moins rapide qu’à l’accoutumée, la course s’emballa ; aux avant-postes, une dizaine de coureurs à même de se disputer la victoire, et dans un second groupe, les espoirs tricolores en quête des minima pour les championnats d’Europe de Tallinn (14’00’’ ; 9-12 juillet). 8’07’’ et quelques pour la tête de course aux 3 000 m ; 8’10’’ pour François Barrer, qui recollait progressivement au Franco-Suisse Julien Wanders, suivi d’Alexandre Saddedine (8’15’’) et de Félix Bour.
Julien Wanders a tenté
Le peloton s’étire, inlassablement, charrie son lot habituel d’abandons. Les visages se crispent. Les coaches crachent les temps de passage et hurlent leur encouragements. Ça sent bon les minima. Dans un dernier tour ébouriffant –comme souvent à Carquefou- l’Ethiopien Dejene Gonfa franchit la ligne d’arrivée en vainqueur (13’25’’70). Derrière, les secondes s’égrènent. Et apparaît un quatuor en bout de ligne droite.
13’47’’69 pour François Barrer, repris par Alexandre Saddedine avant la cloche mais qui est parvenu à finir fort ; 13’49’’21 pour ce dernier (respectivement 8e et 9e perfs européennes) ; 13’53’’ 56 pour Julien Wanders (lire ici son interview), qui représentera la Suisse aux championnats d’Europe juniors, et 13’54’’83 pour Félix Bour. La joie est de mise dans l’aire d’arrivée.
« Je voulais faire mon record (13’48’’21) mais on ne peut pas le faire à chaque fois. Je pense que j’étais plus en forme. J’ai essayé de prendre des risques pour suivre la tête. Ça a accéléré après 1,5 km. Il y a eu trois tours en 64’’ et puis finalement je le paie car c’était trop tôt dans la course. Mais j’ai pris des risques et ça va payer » indique Julien Wanders, qui disputera un dernier 1 500 m la semaine prochaine à Nivelle (Belgique) avant les Europe juniors qu’il disputera donc sous le maillot helvète.
François Barrer « sans se prendre la tête »
« Je suis très satisfait. Je suis parti prudemment contrairement à d’habitude et j’ai fait un gros dernier 1 000 mètres. Oui, les minima étaient l’objectif, voire de faire 13’45’’ » confie Alexandre Saddedine, de retour sur le 5 000 m après 2013 et une sélection aux Europe juniors à Rieti.
« Je voulais faire les minima et être dans les trois premiers espoirs français » ajoute en écho Félix Bour, pas épargné par les blessures ces dernières années (fracture de fatigue au péroné gauche fin 2012 puis au péroné droit en décembre 2013). « Je n’étais pas super impliqué sur les à-côtés. Je faisais un peu le con, je suis vachement plus professionnel. Tout ce qui est alimentation, sommeil etc…j’essaie vraiment de faire gaffe, pour réussir tout simplement ».
Le sociétaire de l’Athlé 55 s’est accroché dans le final à François Barrer et à Alexandre Saddedine, « François est costaud, il a un an de plus que nous. Avec Alexandre, on est un peu nouveau sur le 5 000 m, on essaie de faire des gros chronos, montrer qu’on est là. C’est vrai que ça faisait longtemps qu’il n’y avait pas eu trois Français en dessous de 14’. Ça montre que le niveau a augmenté et c’est bien ».
Il faut remonter à 2005 pour trouver trace de trois Bleus en lice sur 5 000 m aux Europe espoirs(Thibault Naël, Stéphane Lefrand et Yohan Durand) et bien plus encore pour en trouver trois sous les 14 minutes (quatre même si l’on rajoute Julien Wanders).
Le soulagement était perceptible chez François Barrer, qui parvint à aborder cette importante échéance, de manière décontracté, à contrario des France Elite cet hiver à Aubière, où il fut hors sujet. « Je crois que je me suis mis vraiment trop de pression aux France Elite. On m’a dit juste après la course, même mes adversaires, que j’étais tout pâle, voire même malade. Alors qu’à Reims (8’06’’31 sur 3 000 m, record indoor, ndlr), je suis arrivé vraiment en touriste et c’est là que j’ai perfé. J’arrive un peu mieux à gérer çà. Là, c’était la course à ne pas rater. Je suis arrivé cool, sans me prendre la tête, un peu comme à l’entraînement, et c’est passé ».
Minima pour Hugo Hay et Mehdi Frère chez les juniors
Le sociétaire du Dac Reims, qui avait déjà couru sous les 14 minutes en espoir 1 il y a deux ans (13’58’’82) a pris ses responsabilités, quand il fallut relancer l’allure pour raccrocher le wagon de devant, et notamment Julien Wanders.
« Oui, je dois bien faire 2 km seul en menant. Il y avait Julien qui commençait un peu à ralentir, il m’a d’ailleurs laissé passer à la corde. J’aurais bien aimé qu’on me relaie un peu après. Ça veut dire que ça peut aller encore allé plus vite. Je suis soulagé mais ce n’est pas non plus une surprise. C’est une étape de franchi pour les championnats d’Europe » poursuit celui qui a effectué un gros dernier tour et qui courra la semaine prochaine sur 1 500 m. « Ça fait plusieurs courses que je fais un bon dernier tour. Et j’ai vachement progressé en vitesse. C’est de bon augure pour les Europe où il faudra sûrement finir fort » conclut-il, alors que la deuxième série, très dense, bat son plein.
Avec des juniors là aussi performants. Bien qu’en retard de deux secondes et demi sur les minima pour les Europe à 500 m de l’arrivée, Hugo Hay et Mehdi Frère, au prix d’un très gros dernier tour, sont descendus sous les 14’25’’ qualificatifs (14’19’’91 pour le premier ; 14’20’’07 pour le second).
Gros finish de Youssef Jaadi
« Ouahh ! » s’exclama Hugo Hay, qui revêtira donc le maillot tricolore pour la seconde fois après les championnats du Monde de cross où il avait termine premier Français (lire ici). « On s’est bien relayés avec Fabien Palcau » soulignait le Sbaciste, qui passait l’épreuve d’anglais du Bac le matin même, à l’instar d’autres jeunes coureurs. « Il y avait de la tension nerveuse, mais il a de la ressource » appréciait son coach Abel Jamain, soulagé.
De son côté, Mehdi Frère ne voulait pas encore y croire, préférant attendre les résultats officiels. « Vous êtes sûrs ? » s’interrogeait celui qui est coaché par un certain Thierry Choffin. «On parle beaucoup du groupe de filles mais il y a aussi un groupe de garçons qui monte (avec notamment Louis Gilavert et Yani Khelaf, ndlr). L’émulation, c’est ce qui nous motive ».
Ce n’est pas non plus passé loin pour Fabien Palcau, qui a relancé l’allure de son groupe avant de coincer un peu sur la fin (14’26’’). Cette deuxième série a été remporté de fort belle manière par Youssef Jaadi, qui s’était révélé en janvier dernier à la Prom’Classic à Nice (lire ici). Après avoir placé une franche accélération à environ cinq tours de l’arrivée, le Marocain étudiant à Nice a terminé en solitaire, s’offrant un joli chrono tout proche des 14’ (14’04’’43).
Toujours est-il que dans une discipline qui semble de plus en plus désertée par les meilleurs seniors, privilégiant le court ou montant sur la route, les performances de ces juniors-espoirs sont une vrai bouffée d’air frais.